Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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1 avril 2015

Étrange livre que voilà. Difficile de se frayer un chemin balisé entre les rêves, les fantasmes, les délires, la réalité -fictionnelle- de la vie d'Ézéchiel. Je pourrais résumer mon impression par un dialogue du livre lorsqu'Ézéchiel lors d'une soirée dit qu'il lit un roman africain :

"Vous aimez ?

Je ne comprends pas tout. (...) Ça parle d'identité... (...) C'est marrant, enfin je veux dire joyeux. Un peu compliqué parfois, mais ce n'est pas grave. Parce que le vrai sujet du roman, c'est la langue. Parler comme si on faisait l'amour. Ça doit être compliqué d'écrire aussi simplement." (p.138)

Ce roman entre le rêve et la réalité est écrit dans un style étonnant, Ézéchiel en est le narrateur, qui passe du "je" au "il" sans que cela ne gêne le lecteur qui s'y retrouve toujours. Certaines pages sont néanmoins déconcertantes, d'autres absolument magnifiques.

Une histoire elliptique, très imagée, notamment lorsque pour évoquer la masturbation, Koffi Kwahulé parle de prière ou de méditation, une métaphore qui dure jusqu'à la fin du roman : "Aussi ses séances où le plaisir était constamment différé constituaient-elles à ses yeux une prière. Une prière à lui-même adressée. Une profonde méditation. Plus la séance durait, plus la jouissance et surtout le sperme lui paraissaient de meilleure qualité. Au fond de lui-même, depuis la découverte de cette maîtrise de soi, cette recherche d'équilibre, Ézéchiel se considérait comme un moine des temps modernes. Certains jours, Ézéchiel priait plus que de raison." (p.28)

Je ne connaissais pas l'auteur, qui écrit là son troisième roman mais qui est plus connu pour ses nombreuses pièces de théâtre ; une découverte marquante.

Son but : montrer des choses qui doivent être corrigées

Glénat BD

25,50
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1 avril 2015

Très bel album sur les États-Unis du début du siècle dernier confrontés au travail des enfants. Pour les familles très pauvres, ce travail était une nécessité, les parents ne pouvant pas se passer de cet apport de revenu aussi minime fut-il, car en plus de travailler dur, les enfants étaient mal payés. Tout cela, on le sait déjà ; on sait également que ça existe encore dans certains pays dans lesquels les Occidentaux font fabriquer leurs produits qu'ils importeront et vendront cher.

Cette BD a le mérite de nous rappeler qu'il a fallu que certains se battent contre l'exploitation des enfants, contre la course au profit pour libérer les enfants : "La consultation des archives locales était assez édifiante... On y lisait que plusieurs législateurs progressistes s'étaient cassé les dents à vouloir obtenir ne serait-ce qu'un semblant de réforme sur le travail des enfants. La partie était perdue d'avance parce qu'ils avaient en face d'eux le tout-puissant lobby de patrons. Ceux-ci n'envisageaient pas de se priver si facilement d'une telle main-d'œuvre, par définition docile, qu'ils pouvaient exploiter sans vergogne." (p.22)

Cet album s'il met en scène Owen, un personnage fictif, est basé sur la réalité d'un reportage photo mené par Lewis Hine. Owen Brady est son double professionnel mais sa vie d'enfant martyr et d'adulte violent -parfois de manière totalement contradictoire avec le reportage qu'il réalise, avec les gens qu'il rencontre- est fictive. Sans faire de la psychologie de comptoir, Marc Malès met bien en dessins la difficulté de faire face à son enfance lorsqu'une situation qu'on rencontre adulte nous la remet en pleine face. Reproduit-on la violence dont on a été victime ? Jusqu'où peut-on expliquer les pulsions violentes des adultes battus et exploités lorsqu'ils étaient enfants ? Peut-on tenter de réparer le mal fait ? En ce début du XX° siècle, les réponses psychiatriques, psychanalytiques, et autres psy n'étaient pas encore pratiques courantes.

Format à l'italienne qui permet d'élargir certaines cases, de faire des panoramiques, jeu avec le nombre des cases par page, dessin réaliste et ton sépia font de cet album une belle réalisation, une bande dessinée sociale et historique.

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1 avril 2015

D'autres personnes étrangères au trio meurent de meurtres déguisés en accident ou en suicide. Agnès, internée, meurt brûlée, Georges sous les roues du métro, ... Tous les morts entendront avant de succomber, susurrés à leurs oreilles des vers de Rimbaud.

Voici un roman noir totalement original si ce n'est dans son intrigue au moins dans son scénario et surtout dans ses personnages. Le premier truc, c'est déjà de s'habituer à la narration très particulière de Gilles Verdet qui alterne le langage oral, l'argot, la poésie. J'ai mis un peu de temps, j'ai même tenté de sauter des paragraphes, mais test inutile car irréalisable tant cette écriture vous tient malgré la -très- relative difficulté du départ à s'y faire. C'est une putain de belle langue qui impose son rythme et qui oblige à lire tous les mots, je découvre un auteur amoureux des mots, à la plume envoûtante.

Si en tant que lecteur de polars j'ai déjà pu rencontrer semblable intrigue, j'avoue que sa mise en condition m'a bluffé. Rimbaud et Verlaine sont très présents, des vers d'iceux sont cités, ils font partie de l'explication finale. La Commune de Paris, cette révolte de 1871 est omniprésente également, et comme c'est une période sur laquelle j'ai lu et continue de lire (Le cri du Peuple de Jean Vautrin, notamment dans sa version BD de Tardi est excellente), j'ai été irrémédiablement attiré et scotché par ce roman. L'ombre des combattants des barricades flotte sur ce livre ainsi que celle de leurs bourreaux, de Galliffet par exemple ; la Semaine sanglante (du 21 au 28 mai 1871) sert de base historique. C'est un roman noir mélancolique, Paul se balade beaucoup dans les rues parisiennes en essayant de comprendre pourquoi on meurt brutalement autour de lui. Il fait des rencontres, notamment celle de Jean-Philippe Gallet un historien qui l'aidera à comprendre cette période troublée. J'ai appris ainsi l'existence du groupe d'artistes Les vilains bonshommes qui a compté brièvement dans ses membres, Arthur Rimbaud. Je ne suis pas spécialiste du poète, n'ayant pas biberonné à ses vers, je ne suis qu'un piètre connaisseur et amateur de poésie, mais j'avoue que j'ai été embarqué dans cette histoire.

Le suspense tient autant dans l'intrigue que dans les questionnements liés aux personnages : qui sont-ils ? A quoi jouent-ils ? Aucun d'entre eux ne correspond aux stéréotypes de son genre. Ils ont tous un côté mystérieux voire étrange et secret, ce qui est un pur plaisir de lecteur. Les stéréotypes, il en faut, surtout dans le polar, mais lorsqu'ils sont détournés, c'est encore mieux.

Un roman noir avec un fond historique, une langue qui scotche les lecteurs, des personnages qui ne font pas forcément ce qu'on attend d'eux, que demander de plus ? Rien.

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1 avril 2015

La littérature et le cinéma sont emplis de nuits d'amour parfaites, d'amants qui pendant des heures font l'amour, lui tout en performance, elle aussi d'ailleurs ; en plus, ils se réveillent le lendemain matin, frais et dispos, prêts à enchaîner avec une journée de travail et en général, leur travail n'est pas de tout repos : sauver le monde si c'est un film états-unien. Ce guide n'est absolument pas là pour que nous égalions ces performances, mais pour préparer la nuit folle avec le partenaire que nous venons de rencontrer ou avec celui qui partage nos nuits depuis des années.

A la lecture de ce guide, je me suis fait la réflexion qu'il était quand même plus fait pour des rencontres récentes ou alors, pour les moments où les parents se retrouvent enfin sans enfants, partis pour le ouiquende ou encore mieux carrément la semaine en vacances. Ou le top du top, ce sont les parents qui sont partis une ou plusieurs nuits : un séjour à l'hôtel... La prochaine fois que nous partons avec nuits à l'hôtel, je glisserai ce livre dans nos bagages. Cette introduction faite -si je puis me permettre, bien que ce soit encore un peu tôt, nous n'en sommes qu'aux pré-préliminaires-, je ne peux pas dire que le livre soit une mine d'informations nouvelles, mais son très grand mérite est de tout recenser de manière légère, vive et drôle en 180 pages. Quelques conseils de lingerie adaptée, d'ambiance, de mise en condition, ... Quelques pages sur la pilosité (une des grands thèmes actuels dans la sexualité et ailleurs), sur l'utilité de se parfumer, d'accueillir sa belle ou son beau avec un apéritif, musique d'accompagnement (quelques suggestions, Otis Redding, Marvin Gaye, Sébastien Tellier, Donna Summer...).

Après cette mise en bouche -pas tout à fait encore mais ça ne saurait tarder- on passe aux préliminaires ou plutôt comme le préfère l'auteur aux préludes, tant il est vrai que ce mot est plus joli. Puis, le lit si ce n'était pas déjà le lieu d'accueil des préludes et là, je vous la fais courte -oui, il y a un paragraphe intitulé "Il a un tout petit pénis"-, la nuit entre dans ses moments les plus intenses jusqu'au petit matin puisque c'est le dessein de ce livre.

Je ne vais pas vous faire toute la liste des choses à faire ou ne pas faire -ces dernières sont classés dans des rubriques de fin de paragraphes en "Les Tue-l'amour", je finis avec une citation de la quatrième de couverture qui résume parfaitement la collection des guides "Osez..." : "Coquins, amusants, pratiques et joyeux, des livres pour TOUS les goûts sexuels."

17,50
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20 mars 2015

J'ai choisi ce livre sur trois critères : l'éditeur que j'aime bien, l'auteur qui m'avait déjà plu avec son formidable Le cahier bleu et la couverture que je trouve très réussie. Très bonne pioche ! Ce roman m'a emballé de bout en bout. Premier point, Bingo est un gamin attachant, débrouillard, une sorte de Gavroche kenyan du XXI° siècle. Il est de ces personnages de roman qu'on suit avec grand plaisir et pour qui on souhaite ardemment une fin heureuse -mais ça, je ne vous dirai pas... Il est roublard, filou, pas toujours très respectueux des filles ou des femmes qu'il rencontre, il peut même être cupide -dans sa situation d'enfant pauvre, qui ne le serait pas ?- mais chez lui, ça ne sonne pas comme des défauts majeurs, ce sont au pire des péchés de jeunesse, voire des qualités en ce qui concerne la roublardise ou la filouterie. On sent en lui d'énormes qualités humaines qui ne demandent qu'à s'exprimer.


Toutes les personnes qu'il rencontre, ses amis, ses clients, le prêtre, les filles sont importantes pour lui et de chacune il apprend quelque chose qui lui servira, les seconds rôle du roman sont donc importants, bien décrits et très présents, notamment Slo-George l'ami de Bingo, à la placidité réconfortante -il me fait un peu penser au George du roman Des souris et des hommes de J. Steinbeck.

Le cahier bleu de James A. Levine parle de la prostitution enfantine, c'est un roman fort et dur. Bingo's run parle toujours des enfants pauvres dont certains profitent pour leur bénéfice, les dealers, les trafiquants divers. Bingo's run en mettant en scène un gamin des rues débrouillard est moins dur, plus enlevé, pas mal d'humour émaillent les pages, comme par exemple l'histoire de la multiplication des pains par Jésus racontée par le père Matthew, escroc et profiteur, version hilarante dont je vous livre la fin : "La parabole des cinq pains nous enseigne comment le Christ, en investissant l'amour de Dieu, a augmenté le capital et la richesse. Voilà comment Jésus a utilisé les cinq pains pour nourrir cinq mille personnes, grâce à un portefeuille d'investissements avisés. Vois-tu, Bingo, la volonté de Dieu était que la richesse croisse dans son temple et que Jésus, son élu, devienne son unique marchand ; car tel est l'amour d'un père pour son fils." (p. 73). Il reste néanmoins un roman assez dur sur les conditions de vie des enfants des rues dans certains pays d'Afrique qui n'ont pas la chance d'avoir le caractère optimiste et pragmatique de Bingo.

Un très beau roman, fort bien traduit dans une langue simple, accessible qui parlera à tout public. James A. Levine est un médecin-professeur émérite dans une clinique états-unienne. "C'est en parcourant le monde et plus particulièrement les pays émergents pour rédiger des rapports sur le travail des enfants dont les Nations Unies l'ont chargés que lui sont venus l'idée et même le besoin de témoigner, sous forme de fictions populaires, des conditions extrêmement violentes dans lesquelles grandissent et évoluent ses héros." (dossier de presse). Contrat réussi haut la main, comme lui je suis persuadé que les messages passent beaucoup mieux sous des formes pas trop formelles, le roman particulièrement. Bingo est un jeune homme que le lecteur gardera en tête comme la jeune Batuk du Cahier bleu, malheureux symbole de la prostitution enfantine.

Ne passez pas à côté.